L’une des manières d’essayer de résumer le contenu de la Réforme, c’est au moyen des  fameux cinq  solas (solae), du latin signifiant « seul ». Ils m’ont été un guide dans la forêt, une gourde d’eau dans le désert, une épée dans mes combats, un cheval dans mes courses, un chant harmonieux dans  la cacophonie environnante. Pour être aussi littéral que je peux, les solas me sont un pont vers mon Sauveur, une perche pour surmonter les obstacles entre moi et mon Créateur. Une invitation à aimer et faire confiance au Dieu de la vérité et plein de grâce.

Les cinq solas ou cinq seuls sont  une mesure qui  permet de nous situer dans notre compréhension de la Bible en général, et de l’Évangile en particulier. Ils nous aident spécifiquement à nous situer par rapport aux grands thèmes de la Bible : Qu’est-ce que la Bible dit-elle sur elle-même et sur tout autre chose? Qui est Dieu, comment et pourquoi fait-il ce qu’il fait ? Qu’est-ce que le péché, ses conséquences et comment s’en débarrasser ? Qui est Jésus et qu’est-ce qu’il a fait ? Comment une personne est-elle justifiée, acceptée aux yeux du Dieu juste et saint et pratiquement sanctifiée du jour au jour ? Qu’est-ce que l’Église ? Quelle est la mission de l’Église ? Bref, les cinq solas sont comme une fondation sur laquelle les autres matériaux de la Bible sont construits. Jetons un coup d’œil rapide à ces cinq solae issus de la Réforme et confirmés par la Bible : Sola Scriptura (l’Ecriture Seule), Solo Christus (Christ seul), Sola Gratia (la Grace seule), Sola Fide (la Foi seule) et Soli Deo Gloria (à la gloire de Dieu seul).

Sola Scriptura (l’Ecriture seule)

Seule l’Écriture (la Bible) est l’ultime et incontestable vérité  de Dieu. Elle  fait autorité en matière de foi et de conduite. Tout autre écrit, aussi important qu’il soit, doit se plier et se mesurer sur la balance de la Parole écrite. Jean Calvin écrit, dans ses Institutions, que « notre conviction de la vérité de l’Écriture doit provenir d’une source plus élevée que les conjectures ou les raisons humaines ; à savoir, le témoignage secret de l’Esprit. » (John Calvin, Institutes of the Christian Religion, trans. Henry Beveridge (1559; reprint, Peabody: Hendrickson, 2008), 33.)

La Bible est inspirée par Dieu (2 Timothée 3 :16). Elle est vraie, sans erreur ni contradiction (Jean 17 :17), de la part d’un Dieu de vérité qui ne peut jamais se tromper ni mentir (Nombres 23 :19, Tite  1 :2). Le Professeur John Frame écrit que « puisque Dieu ne peut pas tromper ou être ignorant, Dieu est inerrant dans ce qu’il pense et ce qu’il dit. Étant donné que l’Écriture est sa Parole, l’Écriture, elle aussi, est inerrante. » (The Inerrant Word: Biblical, Historical, Theological, and Pastoral Perspectives, ed. John MacArthur (Wheaton: Crossway, 2016), 186).

La Parole de Dieu est suffisante à elle-même. James R. White écrit, « La Bible prétend être la seule et suffisante règle de foi infaillible pour l’église chrétienne. Les Écritures n’ont besoin d’aucun complément ; leur autorité provient de leur nature de révélation inspirée par Dieu; leur autorité ne dépend pas de l’homme, de l’église ou du conseil. Les Écritures sont consistantes avec elles-mêmes, s’interprètent par elles-mêmes  et s’authentifient elles-mêmes. L’Église chrétienne considère les Écritures comme la seule règle de foi infaillible et suffisante, et elle est toujours soumise à la Parole, et est constamment réformée par elle » (James R. White, Scripture Alone: Exploring the Bible’s Accuracy, Authority, and Authenticity (Minneapolis: Bethany House, 2004), 28.). Ceci ne veut pas dire que les traditions, les crédos et les autres écrits ne sont pas nécessaires, mais qu’ils doivent être soumis à la Parole inspirée et s’y conformer.

De par ces caractéristiques, la Bible, et elle seule, est l’autorité suprême en matière de foi et de pratique. Remercions Dieu pour sa parole active et vivante (Hébreux 4 :12) qui nous sauve, nous guide (Psaumes 119 :105), nous garde de l’erreur et nous purifie (Psaumes 119 :11). Chérissons-la, soumettons-nous à elle, croyons-y et  laissons-nous guider par elle et elle seule  par  la grâce de Celui qui nous l’a donnée. Barret avait raison quand il a écrit, « Sola Scriptura signifie que seule l’Écriture, parce qu’elle est la Parole inspirée de Dieu, est notre autorité inerrante, suffisante et finale pour l’Église. » (Matthew Barrett, God’s Word Alone: The Authority of Scripture (Grand Rapids: Zondervan, 2016), 23.)

Solo Christus (en Christ seul)

J’ai commencé avec  Sola Scriptura. La raison est que les autres Solae sont fondés sur elle. Le salut qui ne se trouve qu’en Christ seul (Solo Christus) nous est révélé au travers et au moyen des Écritures (1 Corinthiens 15 :3). Sans elles, nous resterions dans le noir en ce qui concerne beaucoup de choses, mais particulièrement et lamentablement, la Bonne Nouvelle. Dans les mots du Réformateur  suisse Zwingli, cette Bonne Nouvelle consiste en ce que « Le Christ est l’unique voie au salut pour tous ceux qui ont été, sont et seront ». Les Saintes Écritures nous révèlent  que Christ est le seul chemin vers Dieu le Père (Jean 14 :6). Christ est le seul Médiateur entre Dieu et les hommes (1 Timothée 2 :5). Christ est le seul nom qui a été donné aux hommes pour leur salut (Actes 4 :12). Christ est l’Agneau qui efface les péchés (Jean 3 :29). Christ a été la victime expiatoire pour ceux qui croient en Lui (Romain 3 :25). Christ est le seul en qui on croit pour être enfant de Dieu (Jean 1 :12-13), pour avoir la vie éternelle (Jean 3 :16,1 Jean 5 :12). Sans les Écritures, on louperait cette glorieuse nouvelle « sujet d’une grande joie » (Luc 2 :10)

« Nous savons par l’Ancien et le Nouveau Testament de Dieu que notre seul consolateur, rédempteur, sauveur et médiateur avec Dieu est Jésus-Christ, dans lequel et par lequel seul nous pouvons obtenir la grâce, l’aide et le salut, et d’ailleurs d’aucun autre être dans les cieux ou sur la terre. », écrit Zwingli ,cité par Timothy George (Timothy George, Theology of the Reformers (Nashville: B&H, 2013), 134 ). Il est notre Roi (Révélation ,17 :14,19 :16). Il est notre Prophète (Hébreux 1 :1-3). Il est notre Prêtre (Hébreux 4 :15, Romains 8 :34). Il est le second et parfait Adam (1 Corinthiens 15 :22). Il est notre sagesse, notre rédemption et notre justice (1 Corinthiens 1 :30). En lui et en Lui seul, nous avons la rédemption ; la rémission des péchés (Éphésiens 1 :7) et la paix avec Dieu (Romains 5 :1). Nous avons besoin de lui et lui seul pour notre vie, et notre vie éternelle (Jean 17 :3). Christ est suffisant pour notre salut (Actes 16 :31), le pardon de nos péchés (Luc 24 :47), notre vie éternelle et notre sanctification. On a besoin de rien et personne d’autre pour notre vie et notre vie éternelle. Seul Christ. Solo Christus.

Sola Gratia (la Grâce seule)

Sola Gratia signifie que sans la grâce, et elle seule, nous serions tous sans espoir d’être sauvés. La Bible enseigne que le Salut appartient à l’Éternel (Jonas 2 :9). S’il ne décide pas de nous l’offrir comme un cadeau, nous périrons car nous sommes incapables de nous l’approprier. Nous sommes morts dans nos péchés (Éphésiens 2 :1). Nous sommes inclinés au péché et cela continuellement (Genèse 6 :5). Nul d’entre nous ne cherche Dieu, nul n’est juste, nul n’aime Dieu et sa loi (Romains 3 : 9-18). Mais Dieu, dans son amour infini, nous justifie gratuitement (Romains 3 :23-26). Saint-Augustin écrit que « La grâce de Dieu par Jésus-Christ notre Seigneur doit être comprise comme celle par laquelle seulement les hommes sont délivrés du mal, et sans laquelle ils ne font absolument rien de bon, soit en pensée, soit en volonté et en affection, soit en acte. » (Vernon J. Bourke, ed. The Essential Augustine (Indianapolis: Hackett Publishing Co., 1981), 176.).

Tout est grâce, même  l’air que nous respirons. Sans la grâce, on ne  peut rien faire de bon. Nous sommes incapables de nous changer (Jérémie 13 :23). Sans la grâce, nous  sommes des cadavres gisant dans le sang du péché (Ézéchiel 16 :16), des ossements secs  sans vie dans la plaine (Ézéchiel 37 :1-10). Mais Dieu, dans sa grâce, nous rend la vie en Christ (Éphésiens 2 :1-6). Nous sommes esclaves du péché (Romains 6 :6, 12, 20, Jean 8 :34), nous sommes hostiles à Dieu (Romains 8 :7), nous aimons les ténèbres, pas la lumière (Jean 3 :19), nous sommes des ennemis de Dieu (Romains 5 :10). Les œuvres, bonnes soient elles, ne nous sauvent pas (Romains 3 :27-31). Sans la grâce divine, elles ne sont que de glorieux péchés qui offensent la majesté du Dieu trois fois saint (Esaïe 6 :3, 64 :6). Sans la grâce de Dieu, cette condition est misérablement irréversible (Matthieu 19 :25-26). Mais, Dieu soit loué pour sa grâce souveraine qui nous sauve (Éphésiens 2 :5,8), nous garde (1 Pierre 1 :5) et nous sanctifie chaque jour (Hébreux 13 :20-21) jusqu’au jour de la venue de notre Seigneur (1 Corinthiens 1 :8). Nous méritons rien sauf le jugement. Mais, la grâce nous acquitte.

« Mais un homme ne peut être complètement humble avant de réaliser que son salut est totalement hors de portée de ses pouvoirs, de ses conseils, de ses efforts, de sa volonté et de ses œuvres, mais absolument de la volonté, du conseil, du plaisir et de l’œuvre d’un Autre – Dieu seul. » (Luther, Bondage of the Will, 100.)

Sola Fide (la Foi seule)

« Les hommes ne peuvent être justifiés devant Dieu par leurs propres forces, leurs mérites ou leurs œuvres, mais ils sont librement justifiés à cause de Christ, par la foi, lorsqu’ils croient qu’ils sont reçus en grâce, et que leurs péchés sont pardonnés à cause de Christ, qui, par sa mort, a fait satisfaction pour nos péchés. Cette foi, Dieu l’impute comme justice à ses yeux » (Article 9 de la Confession d’Augsbourg traduit par  Gerhard Friedrich Bente).

Ce salut, qui ne se  trouve qu’en Christ et en lui seul, révélé par les Saintes Écritures, donné comme un cadeau que nous ne méritons pas, est reçu par la foi et la foi seule (Éphésiens 2 : 8-9). La foi est la main qui reçoit le cadeau du salut. La foi n’est pas quelque chose  que nous offrons, mais quelque chose que Dieu nous offre pour mettre toute notre confiance en Son Fils pour être sauvé (Philippiens 1 :29). Quelle glorieuse nouvelle !

« Comment une personne peut-elle se réconcilier avec Dieu ? Une personne doit réaliser qu’elle a péché contre un Dieu saint, et que le salaire de ce péché est la mort (Romains 6:23). Cependant, Dieu a  trouvé un moyen, par sa grâce, de sauver le pécheur, non pas en fonction de ce qu’il a fait de juste, mais en fonction de sa propre justice, mais par la justice possédée et accomplie par Jésus-Christ. Par la foi, le pécheur doit croire que Jésus est allé à la croix et est mort à sa place – l’innocent pour le coupable. Par la foi (et par le biais de la repentance), le pécheur doit croire que la sanction de sa vie de pécheur lui a été retirée et a été placée sur le Christ. Par la foi, le pécheur doit croire que la justice parfaite de Christ a été enlevée et placée sur Christ. Par la foi, le pécheur doit croire que  justice parfaite du Christ a été portée au crédit de son compte par Dieu. Ce « grand échange » est effectué par Dieu – une déclaration légale – par laquelle il regarde le Christ sur la croix et déclare « Maudit ! ». Et regarde le pécheur et déclare, « Justifié ! » C’est ce que signifie être justifié par la foi sans les œuvres. »  (Why We’re Protestant, An Introduction to the Five Solas of the Reformation Nate Pickowicz,58)

Cette foi qui nous justifie n’est jamais seule (Jacques 2 :14-26). Elle porte des fruits de sainteté et d’amour. Elle produit de bonnes œuvres. Ces bonnes œuvres ne sont pas des causes, mais des conséquences du salut (Éphésiens 2 :10, Tite 2 :11-14). La foi nous sauve car elle nous  amène et nous attache au Sauveur parfait et béni.

Soli Deo Gloria (À Dieu seul soit la gloire)

Il y a de  merveilleuses choses dont on parle beaucoup jusqu’à ce qu’elles perdent la saveur et la valeur. L’une d’elles est la gloire de Dieu. On en parle beaucoup qu’on ne sait plus de quoi il s’agit. Mais, la gloire de Dieu est centrale dans la Bible que tout ce qui y est écrit, commandé et enseigné, l’y est pour cette dernière. La création sert à manifester la gloire de Dieu (Psaumes 19 :1, Esaïe 43 :7, 21), la nouvelle création de même (Éphésiens 1 :6, 12,14) et la fin des temps n’échappe pas à cette gloire (Philippiens 2 :11). Bref, tout ce qui existe l’est pour la gloire de Dieu (Romains 11 :33).

Le mot hébreu traduit par « gloire » ou « glorieux » est kabowd, et il signifie honneur ou splendeur – « quelque chose digne de louange ou d’exaltation ; brillance ; beauté ; renommée » La gloire de Dieu est la manifestation de sa personne et de sa présence. John Piper dit que la Gloire de Dieu est la sainteté de Dieu rendue publique.

Les réformateurs ont redécouvert le but pour lequel tout existe. Ils enseignaient la centralité de la gloire et de la majesté de Dieu. Leurs prédications, leurs écrits, leurs lettres ne pointaient qu’à une seule chose : La grandeur de Dieu. Pour eux, l’Église, la famille, la société, l’éducation, le gouvernement doivent se soumettre à la grandeur du Créateur et Préservateur  de tout ce qui existe. Oh ! Quel rappel pour l’Église moderne !

Les  Réformateurs voulaient que toutes les sphères de la vie  soient soumises à la gloire de Dieu seul. Parmi ces sphères, le salut occupait une si grande place. L’homme est incapable de se sauver. Il est mort dans ses péchés. Seule la grâce divine peut le ressusciter. Le salut vient de Dieu (Psaumes 3 : 8, 37, 39 ; 62 :1, Jérémie 3 :23). Il est donné gratuitement par Dieu et préservé par sa puissance (1 Pierre 1 :5). En guise de conclusion, toute la gloire est à attribuer à Dieu (Révélation 4 :12-14). Aucune once de mérite à qui que ce soit. Il fait tout selon sa volonté et pour la gloire de sa grâce (Éphésiens 1 :6, 12, 14)

« Nous ne nous glorifions jamais vraiment en [Dieu] tant que nous n’avons pas complètement abandonné notre propre gloire. Les élus sont justifiés par le Seigneur, afin qu’ils puissent se glorifier en lui et en personne d’autre», écrivait Jean Calvin (David Vandrunen, God’s Glory Alone: The Majestic Heart of Christian Faith and Life (Grand Rapids: Zondervan, 2015), 13).   Nate Pickowicz  écrit dans son livre Why we’re protestant que « la Réforme a été un effort pour éloigner la religion d’un schéma d’auto-justification et d’auto-salut centré sur l’homme vers la religion des Écritures, qui glorifie Dieu, est centrée sur le Christ et est animée par l’Esprit. »

À une époque où tout semble tourner autour de soi-même et à l’émancipation, Soli Deo Gloria nous rappelle que Dieu, et lui seul, doit être le centre de tout. Il est glorieux. Il est digne de toute la gloire. Sans lui, nous ne sommes rien. Pourtant, sans nous il est ce qu’il est sans aucune diminution ni changement. Nous dépendons de lui chaque milliseconde de notre vie et de notre salut. Nous devons lui rendre toute la gloire. Nous ne glorifions pas Dieu pour le rendre plus glorieux qu’il ne l’était pas. Mais, comme par un télescope, nous essayons de voir et de proclamer sa vraie splendeur et sa  réelle beauté époustouflante.

Vivre pour Dieu et pour sa gloire est la meilleure façon de vivre, car c’est vivre pour la Personne la plus valeureuse et rien que cela ne peut satisfaire nos âmes assoiffées et affamées. Vivre pour Sa gloire, c’est vivre pour ce pour quoi Il nous a créés : Le glorifier et nous réjouir en Lui. Il est la vraie source de tout ce que nous sommes et ce que nous avons. Poursuivons sa gloire et pas la nôtre (Jean 3 :30). Vivons pour lui et lui seul (Romains 14 :7-8). Remettons-nous à Lui. Il n’est pas un chemin qui nous mène au succès. Il est notre succès. Il n’est pas un chemin pour quelque chose. Il est tout ce dont nous avons besoin. Il n’est pas  un moyen à une fin quelconque. Il est la fin de tout. L’Alpha et l’Omega de notre vie. À lui seul soit toute la gloire.

« Soit donc que vous mangiez, soit que vous buviez, soit que vous fassiez quelque autre chose, faites tout pour la gloire de Dieu » (1 Corinthiens 10 : 31) car « C’est de lui, par lui, et pour lui que sont toutes choses. À lui la gloire dans tous les siècles! Amen! » (Romains 11 :36)

En résumé, les pages de la Bible  nous enseignent que nous sommes sauvés en Christ seulement (Solo Christus),  par grâce seulement (Sola Gratia), au moyen de  la foi seulement (Sola Fide), pour vivre à la gloire de Dieu seulement (Soli Deo Gloria).